La légende des Fatas et des Sangs-mêlés - Canto 2
Quand les hommes, vêtus de peaux, se mirent à peupler leur monde, les Fatas n'y prêtèrent guère attention. Il ne s'agissait que d'une créature de plus, mal dégrossie et sans pouvoirs. Ils n'avaient pas les crocs du chien des plaines, ni le venin de l'aspic dos-turquoise. De temps à autre, elles en croquaient un, par ennui. Mais au lieu de les fuir, comme les autres bêtes, les hommes cherchaient leur compagnie. Ils s'agglutinaient à leurs pieds, ridicules, front à terre et fondement en l'air. Ils disposaient à leur côté des cerfs rôtis et des jattes de miel, pendant leur sommeil. Ils entamaient en chœur des litanies étranges, tremblants de trouille, mais prêt à affronter leur appétit. Drôles d'êtres sans jugeote.
Pendant plusieurs millions de lunes, elles ne prirent guère garde à eux, et eux-mêmes finirent par s'en détourner.
Avec le temps, la taille des fatas diminuait sensiblement, leur corps s'adaptait à la nature environnante. Elles découvrirent de nouveaux plaisirs : celui de s'immerger totalement dans une eau fraîche, plutôt que de s'y tenir jusqu'aux genoux ; se gorger de fruits mûrs, chevaucher une bête ; reposer à l'ombre des arbres les après-midi chauds. Leurs pouvoirs diminuèrent en conséquence : elles ne pouvaient plus teindre la lune, ou assécher les mers. Elles ne pouvaient plus, globalement, façonner le monde, mais elles l'ordonnaient toujours, savaient encore faire gronder la terre et jaillir un geyser, peindre les fleurs et parler aux oiseaux.
Alors qu'elles rapetissaient, les hommes évoluaient. Ils créaient, frénétiquement. Ils inventaient le tissage et la musique, les banquets, les rires, l'écriture et les bijoux. Ils couvraient des surfaces de signes et de dessins, remplissaient des charrettes de blé et de vêtements chauds. Ils faisaient des enfants et des familles, des professeurs, des bergers, des artistes. Ils tombaient amoureux.
Et les Fatas, désormais suffisamment petites pour les observer mieux, furent attirées comme des pies par tous ces brillants qu'elles n'avaient jamais contemplé, ni dans les mers ni dans les forêts, toutes ces chansons jamais entendues. Elles prirent alors tout à fait la taille des hommes – et leur aspect, selon les légendes – pour les fréquenter et jouir de leurs trésors. Elles se familiarisèrent avec toutes les merveilles qui sortaient des mains de ces bêtes qui leur avaient semblé au départ si insignifiantes, sans magie, ni griffes, ni fourrure. Ils y avaient préféré, à croire, le bonheur d'avoir des images plein la tête, des couleurs et des musiques. S'ils ne pouvaient ordonner aux cerisiers de bourgeonner, ils savaient créer des fleurs nouvelles, à force de labeur. Dans leurs serres, les fruits devenaient plus sucrés, plus juteux, les vignes plus fertiles. Les merveilleux êtres d'encre et de pierre qui apparaissaient sous leurs mains n'avaient rien à envier aux chimères, qu'ils ne connurent pourtant jamais. Ils savaient représenter ce qui est et ce qui n'est pas, créer des matières, des fumets. Les sons les plus gracieux du monde émanaient d'instruments complexes de bois et de boyaux , des sons qui créaient la joie ou la mélancolie.
Approcher les hommes leur fut aisé : elles n'avaient qu'à donner à de la rocaille cet aspect doré dont ils raffolaient tant, pour s'emparer des soies incomparables et s'en vêtir. Leur extraordinaire beauté suffisait parfois pour se voir offrir tout ce qu'elles désiraient. Elles découvrirent les poèmes, la viande grillée sous une sauce aux baies, les coiffures sophistiquées des femmes et l'architecture. Elles abandonnèrent les parures de corail et de ronces pour l'orfèvrerie et les pierres taillées. Elles devinrent coquettes, et, souvent, paresseuses.
Mais un jour, cela ne suffit plus, avides qu'elles étaient devenues. Un jour, elles voulurent l'amour.
C’est vrai qu’on a suivi Olga au château, mais qu’on n’a pas su comment les gens se débrouillaient sans elle. S’ils n’ont pas de nouvelles entre-temps, ils comprendront quand elle ouvrira son dispensaire. Malgré l’épidémie, la ville continue à vivre ; c’est quand même une bonne chose.
C’est la récréation ! :-) Voilà Follet qui vient nous raconter une légende, fort intéressante d’ailleurs. Est-ce que ça veut dire qu’il y a des fatas mêlées à la population et des hybrides ? La suite le dira certainement.
Pour ce qui est du vocabulaire employé, je suis d’accord avec Isapass. Je trouve dommage également de mettre tout un chapitre en italique. Il suffit de mettre des guillemets : ouvrants à chaque début de paragraphe et fermants seulement à la fin du récit.
Coquilles et remarques :
— « Alors ma vieille, ils ont embarqué la jeunette qu'on m'a dit ? ». [Virgule après « Alors » / pas de point après les guillemets fermants.]
— Quand Quat-Doigts l'Albinos parlait [l’albinos, à moins que ça fasse partie de son nom / serait-il aveugle?]
— Et y'a toute une troupe [y a ; il n’y a pas d’élision, seulement l’ellipse du pronom : (il) y a]
— Ah bin ça... [ben]
— J'suis tout juste bonne à accoucher les veaux moi maintenant… [Il faudrait une virgule avant « moi » et une avant « maintenant »]
— et que la cité aura crevé entre temps, tiens ». [entre-temps / il faut mettre le point à l’intérieur des guillemets]
— Mouvement dans la foule. [Dommage de mettre une phrase sans verbe.]
— Pas d'humeur à écouter ces sornettes. A plus l'Albinos [À / « À plus » est une expression trop moderne / l’albinos, à moins que ce soit considéré comme un nom propre]
.
— elles ne pouvaient plus teindre la lune, ou assécher les mers [la virgule est de trop]
— tous ces brillants qu'elles n'avaient jamais contemplé [contemplés]
— donner à de la rocaille cet aspect doré dont ils raffolaient tant, pour s'emparer des soies [la virgule est de trop / obtenir, se procurer, s’offrir, plutôt que « s’emparer de », peut-être ?]
— les coiffures sophistiquées des femmes [élaborées, compliquées, mais pas sophistiquées ; surtout que ce terme est trop moderne]
Mais dans le suivant (qui commence par "avec le temps", ça devient plus littéraire et j'ai trouvé ça un tout petit peu moins crédible. (genre "sensiblement" ou "immerger" ou "en conséquence"). C'est moins vrai dans les paragraphes suivants, mais il y a encore quelques mots qui détonnent, je trouve.
Non que Follet doit parler comme la banshee dans le chapitre précédent, mais peut-être un peu plus modestement quand même, non ?
"– et leur aspect, selon les légendes –" : j'enlèverai "selon les légendes", vu que toutes ses sources sont des légendes. Et ça fait revenir sur terre, je trouve
"elles n'avaient qu'à donner à de la rocaille cet aspect doré dont ils raffolaient tant, pour s'emparer des soies incomparables et s'en vêtir." : je ne trouve pas cette phrase très claire, même si on finit par la comprendre. C'est la seconde partie qui ne va pas : il faudrait mettre acheter, ou obtenir. Là, on dirait qu'elles les volent, alors que justement, elles ont compris l'utilité de l'or.
Le "selon les légendes" c'est parce que certaines légendes disent qu'elles ont l'aspect des hommes, d'autres non, dans e canto précédent. mais on ne le comprends pas en effet...