Les prisonniers formaient une petite file hétéroclite, dans la cour de la prison. Ils étaient nerveux. Nul n'avait su leur expliquer ce que leur voulait la maigrichonne aux pieds nus, et pour cause : les geôliers eux-mêmes n'étaient sûrs de rien. Beaucoup n'avaient pas vu la lumière du jour depuis longtemps. Alors que la saleté et les guenilles leur étaient devenues une seconde peau malgré eux, ils étaient hébétés de se tenir à l'air libre, propres, rasés de frais et vêtus de neuf.
Olga avait imposé tout cela. Les geôliers avaient hésité, mais devant le ton péremptoire de la jeune fille, il avaient fini par obtempérer. Après tout, si le Roi l'avait mandée... De l'eau fut chauffée, des tonneaux remplis. Elle avait chargée Follet de courir acheter à crédit des pantes et des chemises, et mobilisé Lotte et sa compagne des bains pour frotter et raser la petite vingtaine d'hommes et de femmes à qui l'on retirait les fers.
Quelques heures plus tard, ils étaient là, méconnaissables, à la fois ravis et méfiants. Ils attendaient les uns après les autres, comme on leur avait demandé. Devant eux, la fille hirsute à la voix autoritaire, dont la robe plutôt élégante était noircie de suif et de tâches brunes, marchait pieds nus et se faisait obéir des geôliers Elle était accompagnée d'un drôle de jeunot aux cheveux vermillons et aux joues pleine, l'air ahuri. Follet était effectivement légèrement décontenancé par la tournure de cette première journée. Il pensait s'occuper de malades, et voilà qu'on l'envoyait acheter des culottes de toile pour les aliénés... Mais il ne se départit pas de son humeur joyeuse, ravi de pouvoir traiter les geôliers en égal-à-égal, exercice qui lui procurait une indéniable jouissance. Olga lui confia une plaquette de hêtre où était fixé un petit encrier, une plume et un parchemin de mauvaise facture, puis fit un signe au premier détenu.
« Approche. Comment t'appelle-t-on ?
– Jan Sans-Dents, Ma... euh, Demoiselle.
– Ton métier ?
– Tonnelier.
– Veux-tu travailler ? »
L'homme leva le menton vers elle, la bouche béant sur ces dents manquantes. Il ne manquait que celles du devant, en réalité.
« Oh bin... oui. Plutôt que croupir toute la journée dans la pisse de rat...
– Je tâcherai de faire écourter ta peine. Suivant. »
Un à un, elle les questionna, sans détours. Et ils répondirent. Les geôliers, parfois, soufflaient à Olga quelques précisions, le plus souvent pour dédouaner les pauvres bougres. Oh, il y en avait bien quelques uns qui avaient tué un homme. Mais c'était des bagarres d'ivrognes ou de maris jaloux. Depuis la condamnation du Dépeceur, plusieurs Nuées auparavant, Kaalun n'avait plus eu affaire à de vrais criminels, pas dans ses murs. Défilèrent donc une danseuse, experte en l'art de voler les bourses pleines, quelques marchands véreux, un tonnelier, un coutelier, deux prostituées qui avaient dépouillé leurs clients, un étudiant idiot, un ébéniste dont on avait oublié la raison de sa présence ici, deux charpentiers, deux mendiants, un valet, un apothicaire au teint vert, et une nourrice qui tint à préciser , les sanglots dans la voix, qu'elle avait enlevé l'enfant qu'elle nourrissait pour l'élever elle-même, et qu'elle le regrettait. Quatre d'entre eux refusèrent de travailler : l'une des deux prostituées, l'apothicaire et deux marchands. Follet nota soigneusement le tout, et remis le parchemin tâché à Olga, les doigts noirs d'encre.
« Bon, toi, le troubadour, ton bagou va nous être bien utile. »
Il fit une grimace boudeuse, mais ne releva pas.
« Cours en ville faire passer le message, lui demanda Olga, le dispensaire accueillera tous les malades dans trois jours, trois jours tu m'entends pas avant. S'il y a des urgences, qu'on m'attende à l'étable place des Vinaigriers, je trouverai bien un moment pour y passer. Tu iras sur le marché, aux Bains, à l'université, partout où tu peux, et tu leur diras dans trois jours, à la prison des Chimères... »
Follet fila. Aller clamer un message devant la foule, c'était un exercice auquel il excellait, sans nul doute !
De quelle façon Annwn est-elle maître des Prieurs ? Dans quoi est-elle impliquée ? Tu nous fais languir. :-) Cet homme a l’air bien hésitant devant elle ; est-il intimidé ou craint-il de se croire obligé de l’agresser, voire la tuer, alors qu’il n’est pas vraiment entraîné pour ça ?
Bonne nouvelle : il n’y a pas de tueur en série parmi les prisonniers. :-) Ceux qui ne veulent pas travailler sont bien bêtes ; à moins qu’ils soient sûrs de pouvoir être mieux payés ailleurs. Olga sait bien s’organiser, en tout cas. Son dispensaire se met enfin en place.
Coquilles et remarques :
Je suis d’accord avec les corrections d’Isapass.
— qui disparaissait régulièrement sous les lourdes racines de chênes-fays, et ressurgissait plus loin [pas de virgule avant « et »]
— Elle distingua le cavalier, alors qu'il était encore loin [la virgule avant « alors qu’il » est superflue]
— L'homme était âgé, et venait sur une mule [pas de virgule avant « et »]
— Ces terres sont hostiles, et il n'y a rien à y faire [pas de virgule avant « et »]
— la main crispé sur une arme cachée [crispée]
— ajouta-t-elle dans un sourire, « Pardonnez, Messire [point après « sourire » à la place de la virgule]
— Cessons ce jeu de dupes et causons, cher ami, reprit Annwn, le seul intérêt [point après « Annwn » à la place de la virgule]
— Il resta coi, sur ces gardes [sur ses gardes]
— et les Prieurs deviennent le sujet d'intérêt numéro un de sa Majesté [Sa Majeseté]
— A la fois soulagé et contrarié [À]
— Mm, je vois ce dont il s'agit, intéressant, fit-elle, surtout par les temps qui courent [Je mettrais un point-virgule après « il s’agit »]
— Bien, à votre tour, voyons si vous êtes aussi érudits qu'on le prétend [érudit]
— Devant le rouleau d'Annwn, l'homme fronça les yeux devant l'écriture courte et serrée [pour éviter d’avoir deux fois « devant », je propose « face à l’écriture »]
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— Les prisonniers formaient une petite file hétéroclite, dans la cour de la prison [la virgule avant « dans » est superflue]
— mais devant le ton péremptoire de la jeune fille, il avaient fini par obtempérer [ils avaient fini]
— Elle avait chargée Follet de courir acheter [chargé]
— Ils attendaient les uns après les autres, comme on leur avait demandé [comme on le leur avait demandé]
— noircie de suif et de tâches brunes [noircie de taches brunes, c’est bizarre ; je propose « maculée » / de taches brunes ; sans accent circonflexe]
— d'un drôle de jeunot aux cheveux vermillons et aux joues pleine, l'air ahuri [vermillon ; les noms employés pour qualifier une couleur sont invariables / aux joues pleines]
— ravi de pouvoir traiter les geôliers en égal-à-égal [d’égal à égal]
— la bouche béant sur ces dents manquantes [ses dents]
— Oh bin... oui. Plutôt que croupir toute la journée [Oh ben]
— Un à un, elle les questionna, sans détours [la virgule après « questionna » est superflue]
— Oh, il y en avait bien quelques uns qui avaient tué un homme [quelques-uns]
— Follet nota soigneusement le tout, et remis le parchemin à Olga [pas de virgule avant « et » / et remit]
— le dispensaire accueillera tous les malades dans trois jours, trois jours tu m'entends pas avant [dans trois jours ; trois jours, tu m'entends ? pas avant.]
— Tu iras sur le marché, aux Bains, à l'université, partout où tu peux [où tu pourras ; concordance des temps]
Et là en plus avec les prisonniers qui ne savent pas ce qui leur arrive, les geoliers qui ne savent pas vraiment s'ils doivent obéir ou pas... c'est génial.
"ravi de pouvoir traiter les geôliers en égal-à-égal" : "d'égal-à-égal" ou "en égal"
"un ébéniste dont on avait oublié la raison de sa présence ici" : excellent ! Et lui, l'ébéniste ? Il ne sait plus non plus ?
"les sanglots dans la voix, " : on s'attendrait plus à "Des sanglots", mais pinaillage