Chapitre 40 - Soigner les blessés

« Aube ? Comment vas-tu ? » demanda Noémie. « Tu étais comme dans le noir, on ne te voyait plus. »

« Noé ! Tu peux me voir ? »

« J’arrive à sentir ce que tu ressens alors j’arrive à deviner ce que tu vois autour de toi » répondit son amie.

« C’est fantastique ! Vous avez été extraordinaires ! »

« Il y a un être-esprit qui nous a aidés, mais je ne comprenais rien à ce qu’elle disait. »

« C’est Zoïg ! »

« Zoïg ? »

« La sœur aînée d’Éfflam. »

« Sa voix était si douce, si calme. »

Aube était assise à l’avant de la voiture familiale. Sa maman était en train de charger le vélo dans le coffre.

« Noé ? » reprit-elle. « Je suis désolée pour le téléphone de ta maman. »

« Pas grave. Je crois qu’on n’en aura plus besoin » la rassura Noémie. « Comment va Éfflam ? »

« On le ramène à la maison. »

Éléonore s’installa derrière le volant.

— Alors, ce chat sauvage ? demanda-t-elle à sa fille.

— Il saigne toujours.

— Sois tranquille. Je vais soigner ça.

— Oh maman, j’ai peur !

— C’est fini, ma chérie.

La voiture démarra en trombe. Aube serra les dents. Sa maman était souvent stressée au volant. En particulier sous la pluie. Et elle détestait les discussions tendues qui l’empêchaient de se concentrer sur la route. Alors elle fonça bouche cousue jusqu’à la maison. Mais dans son silence, elle mit assez d’amour pour rassurer sa fille.

« Aube ? » demanda la voix de son frère dans sa tête.

« Max ! Maman est venue me chercher ! » répondit Aube.

« Maman ? » s’étonna-t-il. « Qu’est-ce qu’elle fait là ? »

« Je te raconterai. Comment est-ce que tu as su où j’étais ? »

« J’ai fait semblant d’aller aux toilettes et j’ai retrouvé Noé qui était en train de te parler » expliqua-t-il. « Je savais que tu avais besoin de moi. Comment va papa ? »

« Il va bien. Mais je crois qu’il rentrera encore plus tard que d’habitude à la maison. Si tu voyais le travail qu’il y a ici pour tout remettre en état. »

— Aube ! intervint leur mère. Dis à ton frère de retourner immédiatement en classe. Je viendrai le chercher moi-même à la sortie de l’école.

« Désolée » s’excusa la fillette auprès de Max. « Tu as entendu ? »

« Oui ! J’ai compris » répondit celui-ci.

— Il a compris, répéta-t-elle pour sa mère.

— J’avais entendu.

Aube regarda sa mère avec une grimace d’amusement et d’inquiétude. Pas possible ! Elle entendait les conversations secrètes de ses enfants. Comment allaient-ils se débrouiller à l’avenir pour leurs petites escapades ?

 

Éléonore installa Éfflam sur la table de la cuisine et entreprit de désinfecter sa plaie.

— La morsure est profonde, mais elle n’a rien atteint de vital, expliqua-t-elle.

Aube caressait le cou de son ami.

— Tiens, lui proposa sa mère. Tu vas tenir cette compresse appuyée sur sa blessure pour empêcher le sang de couler. Le temps que je lui mette un bandage.

La fillette obtempéra, impressionnée par les connaissances et l’efficacité de sa mère. Celle-ci la bouscula gentiment.

— Tu oublies un peu vite que je travaille chez un vétérinaire, précisa-t-elle. Bon d’accord, pas à temps plein et seulement comme assistante. Mais j’ai déjà vu pire que ça.

— Mais maman, ce n’est pas un animal.

— C’est ce que tu crois ? la coupa-t-elle. Moi, je te dis que ce gros chat sera vite remis sur pattes.

— C’est un enfant ! insista Aube.

— C’est sûr ! Un adulte ne se serait pas laissé surprendre de cette manière. Visiblement, il a surtout été choqué, mais il reviendra bientôt à lui.

— Il s’appelle Éfflam.

— Drôle de nom pour un animal, la taquina sa mère. Allez, prends-le doucement dans tes bras.

Aube souleva précautionneusement son ami, sans toucher son épaule bandée.

— Je peux l’installer dans ma chambre ? demanda-t-elle.

— Hors de question jeune fille !

Éléonore ouvrit la porte du jardin.

— C’est un animal sauvage, conclut-elle. Il n’y a que les siens qui puissent le garder et le guérir. Ramène-le auprès de Zoïg. Elle saura prendre soin de lui.

— Tu connais Zoïg ? s’étonna Aube.

— Si tu crois que j’ai le temps de courir dans les bois, lui répondit Éléonore.

La fillette sourit à sa mère et s’arrêta sur le pas de la porte.

— Maman ? Est-ce que je peux d’abord passer prévenir Jeanne ?

— Non, ce n’est pas possible. Je suis désolée, ma chérie.

Aube comprit aussitôt qu’il s’était passé quelque chose de grave. Elle lut dans les yeux de sa mère que celle-ci avait reçu une mauvaise nouvelle.

— Sa famille a eu la gentillesse de me téléphoner, ajouta-t-elle.

— Qu’est-ce qui lui est arrivé ? s’énerva la fillette.

— Elle vient d’être placée dans une maison de retraite, expliqua sa mère. Elle perdait la tête. Elle ne pouvait plus vivre seule.

— Non ! Ce n’est pas possible.

Aube ne prit pas la peine de sécher les larmes qui coulaient sur ses joues et sur le pelage de son ami.

— File à présent, l’encouragea sa maman. Zoïg t’attend.

Elle caressa sa fille sur le front.

— Nous irons voir Jeanne dans son nouveau chez elle ce week-end, promit-elle.

La fillette embrassa sa mère et fonça vers la colline, son précieux fardeau contre elle.

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
Baladine
Posté le 07/03/2023
Bonjour Michael,

Joli chapitre. Eléonore est amusante et en sait plus qu'elle ne veut bien le laisser entendre (et on dirait qu'elle prend aussi plaisir à dévoiler à sa fille qu'elle connaissait déjà une grande partie de ses secrets !)
-Sa maman était souvent stressée au volant. En particulier sous la pluie. Et elle détestait les discussions tendues qui l’empêchaient de se concentrer sur la route. => je suis pareille ^^
- Pas possible ! Elle entendait les conversations secrètes de ses enfants. Comment allaient-ils se débrouiller à l’avenir pour leurs petites escapades ? => ça m'a fait rire. Pour taquiner je dirais qu'ils auraient besoin d'un téléphone. Mais je ne suis pas sûre que Aube gouterait la plaisanterie ^^
- Aube ne prit pas la peine de sécher les larmes qui coulaient sur ses joues et sur le pelage de son ami. => ohhh j'aurais envie de sentir l'émotion monter avant que les larmes soient séchées....

En tout cas, c'est toujours un plaisir de te lire !
A bientôt
MichaelLambert
Posté le 07/03/2023
J'espère que l'évolution d'Eléonore fonctionne bien, est crédible et intéressante !
Puis, comme avec les méchants, j'ai un problème avec les larmes : je les laisse souvent sécher trop vite !
Merci pour tes retours et tes réflexions si précieuses !
Elly Rose
Posté le 07/12/2022
Me voilà donc vite de retour,
J'aime particulièrement la douceur et la fermeté dont fait preuve Eléonore et pourtant, quelques petits points me laissent perplexes. Depuis le début pouvait-elle entendre les pensées de ses enfants? Cela signifierait qu'elle a toujours su ce qu'il se tramait, leurs petits mensonges, leurs plans? Alors, comment se fait-il qu'elle ait toujours agit comme si elle découvrait les choses sur le tard?
Je suis également touché par le sort de Jeanne, j'ose espérer qu'elle continuera d'œuvrer à sa manière et que notre cher petit Efflam pourra vite être remit sur pattes!
J'ai toujours aussi hâte de découvrir la suite, mais cela n'est en rien une surprise.
Je te remercie pour ces si agréables moments de lecture que tu nous offres.
Belle soirée.
MichaelLambert
Posté le 08/12/2022
Oh j'espère que la douceur que tu découvres chez Eléonore est une bonne évolution par rapport à la fermeture dont elle fait preuve au début de l'histoire.
En te lisant, je me rends compte qu'un point évident pour moi ne se retrouve pas dans ce que j'écris : même quand on a le don d'entendre les pensées, on n'entend pas tout immédiatement, on a besoin de s'entrainer, d'avoir l'esprit ouvert et non pollué par d'autres pensées, ce qui explique qu'Eléonore n'entend pas quand elle est stressée ou préoccupée. En plus, je ne l'ai pas encore développé à ce stade (et je voulais garder ça pour la suite des aventures de Aube) elle n'est pas ravie que la famille possède et développe ce don qui a déjà valu de nombreux ennuis à son mari, ce qui l'amène à se couper de cette magie et à la refuser. Mais tout ça serait mieux si on le comprenait dans l'histoire et pas grâce aux petits commentaires en bas de page de l'auteur !!! Ta question est précieuse pour que je n'oublie pas ça ! Ah je vais avoir du boulot et un gros travail de relecture réécriture en perspective !
Encore mille mercis pour tes commentaires assidus, encourageants et pertinents !!!
Elly Rose
Posté le 08/12/2022
Honnêtement, je suis vraiment rassurée et soulagée qu'Eléonore se dévoile sous un jour nouveau. Ces petites informations permettent de rendre le personnage plus complexe, plus attachant aussi.
Peut-être que ce n'est que moi qui n'ait pas su déceler le fait que le don de la petite famille avait son lot de subtilité et il est vrai que Eléonore est souvent bien trop préoccupée pour avoir eu le temps de nous démontrer tous les trésors dont elle recèle!
Merci à toi, sincèrement, de nous faire partager ce récit
Vous lisez