Chapitre XV - Où auprès de son arbre Estienne vivait heureux (3/3)

Notes de l’auteur : [Scène complètement réécrite, le 26/11/2023 suite aux commentaires et bêta-lectures. Merci pour les premiers retours, et bonne lecture à vous qui arrivez !]

Estienne était si harassé ce samedi que son corps rechignait à fonctionner malgré les beuglements et la cloche. Ses terreurs n’aidaient pas, ni ce cauchemar qu’il avait fait à nouveau – Saint-Sébastien, les serpents… –, ajoutés au froid d’un hiver éternel. Il riva son regard aux visages d’autres détenus, éteints par l’épuisement généralisé de la saison. Pas la force aujourd’hui d’adresser ses aimables œillades ou quelque pantomime à qui croisait sa route. Ses pairs n’étaient – eux aussi – plus que des spectres. Les choses ne furent pas pour s’arranger lorsqu’il apprit devoir se rendre au-dehors, gratter le gel des grilles et huiler les serrures. Allons soldat, à l’attaque. Et ça ira mieux demain !

Au fil de la distribution des tâches, il entendit un molosse commander au sorcier de retourner aux cordes. Puis à l’astiquage des seaux à merde : une corvée qui venait de faire son entrée dans les journées du 251. Estienne secoua la tête. L’affectation d’Hyriel à des travaux plus doux n’aura été que de courte durée. Gros malin. Sacre Couille de toi ! Des tâches plus supportables telles que le décrassage de manteaux ne lui auraient pas déplu, à lui, songea Estienne entre deux claques du vent et deux coups de grattoir. La rage qu’il y déversait lui tailladait les articulations. Le souvenir d’un autre récurage l’obsédait. Le sang d’Hyriel au pied du poteau. Ce sang qu’il avait tant peiné à ôter, c’était comme s’il ne partait pas. Ne partirait jamais. Incrusté dans son crâne, dans les pierres propres au dehors du bâtiment, sous ses ongles qu’il rongeait furieusement. Ineffaçables traces de ces inquiétudes qu’à trop de reprises Estienne avait bâillonnées. Il devenait fou à ruminer les images, les odeurs, la mort. Fou… Il devenait fou !

À quatre couloirs de là, le 251 grelottait dans la bise qui s’engouffrait par les parois peu isolées. Il contractait ses doigts bleuis autour des cordes, puis des pots à excréments. Adieu, offices privilégiés, maintenant que son masque de repentir avait chu. Et ce n’était que le début : le sorcier pressentait que Berlinier nourrissait l’intention de lui faire payer infiniment ses récentes folies. Sans doute aurait-il dû se coucher et embrasser ce maudit sol… Hors de question. Hyriel accéléra son frottement sur les seaux à mesure qu’il travaillait à se convaincre qu’il n’était point en tort.

Le lendemain, toujours aussi acariâtre, sonné par ce sommeil après lequel il avait l’impression de courir sans jamais le rattraper, Hyriel assista à la messe. Debout, entassé avec ses pairs à écouter les oraisons dans l’infect mélange du froid et des puanteurs. Rester droit sur ses quilles toute une heure à entendre des fables équivalait pour Hyriel à une autre forme d’érosion ! Au moins se plut-il à espérer que les administrateurs eux-mêmes trouvassent le temps interminable. Sa seconde satisfaction tenait à ce qu’après la messe venait la vacance du dimanche après-midi.

Hyriel avait la nausée. Et si mal tout le long de ses os… Encore. Toujours. Rien ne passait plus, pas même la nourriture avalée avec peine. L’estropié traîna la patte dans un couloir, souhaitant se dénicher un coin tranquille où essayer de dormir. Un coin autre que le havre des meilleurs amis du monde. Il voulait rester seul. Refusait l’éventualité de voir Théa débarquer.

En arrivant au fond de l’étroit corridor sur lequel son choix s’était arrêté, Hyriel retint une grimace d’agacement en notant qu’un bruit familier de sabots l’avait suivi. Malgré son amour pour Estienne, tout ce que réclamait son corps brisé se résumait à du silence, à de l’isolement, à du sommeil. Pourtant, Hyriel ne partit pas. Il tourna les talons pour se trouver face à Estienne. Le muet le fixa de ses yeux rouges, enfoncés dans leurs cernes. Il prit sa craie, chercha quelque chose à écrire, cependant… rien ne s’imposa à lui. Hyriel renâcla : ils étaient deux à ne pas savoir quoi se dire. Du menton, il désigna le mur.

— Tu veux que je te laisse seul pour dormir au calme ?

Il venait de projeter son propre désir dans ces mots. Les dernières paillettes de lucidité sous son crâne le poussaient du reste à considérer – pour une fois – la prudence de ne pas demeurer ensemble au cas où passerait un officier. Estienne s’adossa aux pierres et y glissa en dépit de la rugosité, jusqu’à se trouver avachi à terre. Fermement décidé à aborder le sujet fâcheux, il dénicha enfin quelque chose à exprimer en guise de préambule. Sa craie s’effrita. Il présenta :

TU PEUX RESTER

Voir la mine brisée d’Hyriel rappela à Estienne sa sempiternelle question : à ce rythme, combien de temps avant que son ami ne se cassât ? Avant le danger de trop. Et combien de temps avant que, lui, dût encore ruser, faire avaler des menteries à Théa, avoir bonne figure… Un élan agita Estienne. Il traça des lettres nerveuses qu’il n’en pouvait plus de remâcher au fond de lui.

AY EU SACRÉE VENETTE
POUR TOY, TU SAIS

Hyriel lut d’un œil éteint. Il fronça les sourcils : allons, ce n’était pas en s’inquiétant qu’ils se reposeraient. À quoi bon ruminer les épreuves traversées ? Il resta hagard avant d’esquisser enfin un sourire penaud. Il gratifia Estienne d’une tape à l’épaule.

— Pardon de t’avoir fait peur…

Sa réponse n’était pas la plus intelligente qui fût mais il ne trouvait pas mieux. D’autant qu’un désagréable doute lui montait au nez : devait-il déchiffrer un reproche entre les lignes de son compagnon ? Aurait-il donc préféré qu’il rampât comme une loque aux pieds des profiteurs ? Non, Hyriel n’espérait pas ! Pourtant, il devina un début de colère dans le pli de sourcils d’Estienne.

Et pour cause, le muet trouvait cette réponse un peu courte. Hyriel avait-il conscience de sa chance d’être encore vivant en dépit de toutes les provocations déjà à son tableau de chasse ? Estienne refusait de perdre Hyriel – et de le voir se perdre lui-même – si bêtement. L’idée lui retourna l’estomac. Dans son regard tonna un éclair et sa craie sembla se briser, bruyante :

TU PRÉVOY PAS
DE RECOMENCER
TOUT DE SUITE ?

Hyriel arrondit la bouche et marqua un recul, sur la défensive. Tu prévois… Sérieusement ? Il… Non… Si ? Ses yeux écarquillés se relevèrent jusqu’à ceux d’Estienne et clignèrent, avant de s’étrécir en deux fentes de fureur.

— Parce que tu penses vraiment que je suis allé me faire fouetter volontairement ? Je te remercie mais non, je ne prévois pas de m’affamer et m’assoiffer en me vidant de mon sang.

Estienne s’ébroua face à tant de mauvaise foi. Par où commencer ? Devait-il lui rappeler l’affaire des chaussures de Berlinier ? Les conséquences qui s’en étaient suivies pour eux deux revinrent palpiter dans sa gorge. Puis ç’avait été la chute de Georn. Quant au tour joué à Peillet… certes oui, le muet avait sa responsabilité. Il ne pouvait en revanche en penser autant des piques supplémentaires que, le lendemain, Hyriel ne s’était pas privé de jeter au recteur ! Un sauvage sursaut de sa main laboura l’ardoise, lâchant autour des projections de craie.

IOUE PAS AU PLUS COUILLON
AVEC MOY ! AS TRÈS BIEN COMPRIS

Et sans laisser à Hyriel le temps de répondre, prévenant toute tentative de sa part avec un soldatesque signe de sa paume ouverte, de l’autre main il poursuivit à une allure effrénée :

TU AS TOUT FAIT POUR QUE ÇA
ARRIVE EN METTANT, COMME
TOUIOURS, HUILE SUR FEU

Hyriel piaffa. Décidément, avec le caporal-chef sur le dos, pour le repos il repasserait ! Il se pinça la lèvre et leva les yeux au plafond. Exaspéré, ses poings se serrèrent.

— Si j’avais voulu que ça arrive, j’aurais pu faire bien pire ! Ah ça, oui ! Tu n’as encore rien vu ! Figure-toi que ça ne m’enchante pas plus que toi, ce qui s’est passé, ça non ! J’ai même limité les dégâts, hein, en ne disant pas à ce cher recteur tout le bien que je pense de lui. Attends, c’est point ma faute s’il est allé pleurer chez Peillet ensuite ! J’y ai pas poussé ni prévu, moi !

Estienne crispa si fort ses poings osseux que ses jointures en ressortaient blanches. Son ardoise allait et venait sur sa poitrine au gré de ses gestes rageurs. Crachotis sous son masque.

SI. ON AUROY
PU PRÉVOYR

— Et comment, s’il te plaît ? J’suis sorcier si vous voulez, mais pas encore devin ! railla Hyriel. Et qui ne tente rien n’a rien. T’es pas content qu’on se soit payé l’autre pourriture ?

Avec le recul, Estienne jugeait qu’ils auraient dû se douter que le recteur s’emploierait à récupérer le poisson, avec autant d’ardeur que les enfermés lavaient le linge. Les nerfs vrillés, il se prostra, rentra sa tête entre ses jambes pliées. Sa craie se fissura à une vitesse folle pour envoyer :

IE REGRETTE. EN PLUS POUR UN
POURRI VIRÉ, COMBIEN D’AUTRES
VIENDRONT ? SI C’EST PAS
ÇUI-LÀ, CE SERA 1 PAREIL

Alors à quoi bon ? Estienne se balança d’avant en arrière, secoué de secs borborygmes. L’Hôpital s’en remettrait, songea-t-il. Tout lui parut vain désormais. À quelle fin dès lors Hyriel jouait-il les rebelles, hormis pour mourir plus vite ? Précisément, peut-être pour mourir.

Hyriel cependant ne l’entendait pas de cette oreille. Il avait roulé des yeux bien haut et craché un rire rauque aux mots qui hurlaient sur l’ardoise. Prévoir… l’on ne tenterait plus rien, à ce tarif-là ! Il sentit qu’il n’avait pas fini d’en recevoir plein la gueule mais ne capitulerait pas.

— Ce qui importe, c’est qu’on en ait chassé au moins un ! C’est pas beaucoup mais faut bien commencer quelque part. Tes scrupules de bon petit soldat, tu peux te les garder.

Il s’appuya contre le mur et croisa les bras. Une déglutition fendit la poitrine d’Estienne. Ç’eût été mentir que de prétendre n’avoir pas été séduit par cette flamme, par ce grain de folie chez un Hyriel capable de tout. Le plus bel ange de Dieu n’était-il pas son ange le plus révolté ? Ici toutefois, à l’Hôpital, avoir l’âme farouche se payait trop cher ! Estienne se trouva faible, jouet d’une rage qui éclata. Il se releva, approcha d’Hyriel et porta ses mains hérissées à ses épaules dans un assaut colérique. Ses narines étaient encore terrassées par l’odeur ferreuse du sang au sol. Et ses oreilles par le fouet. Que ferait Estienne, à nouveau seul, sinon redevenir mur de silence ? Qu’inventerait-il pour consoler Théa ? Hyriel se crispa, désemparé sous les secousses du muet. Mais déjà, les puissantes poignes du vétéran s’éloignaient pour rester hagardes, pendues dans le vide. Puis Estienne gratta :

MAIS Y A LES AUTRES FOYS OÙ TU
T’ES FAY REMARQUER. VEUX PAS
CREVER DE TON ORGUEIL QUAND M…

Sa craie cassa. Sa dernière craie. Il ne manquait plus que cela pour rompre de colère ses ultimes digues. Ses bras partirent en un geste d’épouvantail désarticulé. Sa gorge mutilée poussa une plainte. Terrifié et livide, Hyriel eut comme premier réflexe de se plaquer au mur. Puis il se fit violence pour avancer les mains avec l’intention d’envelopper celles d’Estienne entre les siennes. Mais le muet s’arracha aussitôt à la prise d’Hyriel. Cette brusquerie laissa le guérisseur interdit. C’était comme si au lieu de retirer ses poings, Estienne les lui avait enfoncés dans le sternum. Passé un instant de stupeur, Hyriel se surprit à retrouver un calme relatif et le cours de ses idées.

— Non, je ne veux pas mourir ! assura-t-il, choisissant d’ignorer pour cette fois-ci l’accusation d’orgueil. Jusqu’à preuve du contraire, j’suis toujours vivant, sans avoir rampé !

Une série de borborygmes gonflés de pleurs chargea l’air. Comme la réponse qu’Estienne souhaitait écrire palpitait sous ses doigts, il se mit à terre et entreprit de ramasser les débris de sa craie. À quatre pattes. Un morceau là. Une miette plus loin. Une autre à l’angle du mur. Il se sentit devenu un chien quêtant ses restes. Il couinait, sa poitrine tressautait. Il collecta les éclats blanchâtres au creux de ses paumes rouges et allait devoir faire avec. Tracer le moins possible. Il épongea la sueur à son front. Sa douleur serra le cœur d’Hyriel, incapable de remuer cependant : le courroux prenait toute la place. D’une de ses pauvres miettes immaculées, Estienne persévéra. Au mépris de ses ongles cassés et en sang, il nota :

TU T VU ?

Le sorcier oserait-il prétendre bien se porter ? Recteur et officiers lui menaient plus que jamais la vie dure. Hyriel baissa les yeux. Oui, il s’était vu… mais il respirait encore. Ses douleurs passeraient… Les doigts d’Estienne, pendant ce temps, se concentraient pour que la minuscule cagade de débris de craie ne menaçât pas de lui échapper à chaque cagade de geste. C’était comme écrire avec un caillou. Ses lettres en furent grossières, tremblantes et détestablement économiques.

IE DI PA DE RAMPER MAI
FAYR MOIN DE VAGUES

Faire moins de vagues, t’es drôle, toi ! C’est pas moi qui décide des diableries des chefs ! Et même si j’étais de moitié plus docile, ils sortiraient malgré tout le fouet !

Alors autant ne pas se priver de leur cracher au visage, se retint-il d’ajouter. Estienne s’était retourné face contre le mur, à bout d’argument, front appuyé au roc. Se fondre avec la pierre. Il frotta ses mains blessées jusqu’à en évacuer assez de poussière crayeuse. Finalement, il fit rouler entre ses doigts un nouveau petit caillou blanc puis essaya :

VRAY. MAIS RAISON DE
PLUS POUR LAISSER COULER

— Et puis quoi encore ! Va cirer leurs bottes pendant que tu y es !

Estienne voulait-il qu’il abandonnât sa dignité, la seule modeste chose toujours en sa possession ? Ne comprenait-il pas qu’en ce lieu qui ôtait toute personnalité, résister était sa façon d’un peu moins se voir mourir ? De demeurer lui-même ? Et un homme ? Apparemment, non.

Le muet piaffa : Hyriel pouvait bien rouler des yeux de merlan frit, arriverait un point de non-retour. Cherchait-il par le trépas un crachat ultime à l’institution qui voulait les exploiter ? Et eux deux ? Et Théa et les autres ? Il ne comptait donc pas assez dans son cœur pour le sauver.

TON ENTESTEMENT,
SI FOL & ORGUEILLEU

Orgueilleux, encore ? Tu n’as que ce mot à la bouche, persifla-t-il.

Estienne fronça des sourcils outrés. Si Hyriel pensait que ses railleries l’arrêteraient, il se mettait la béquille dans l’œil ! À ce compte-là, leurs codétenus étaient-ils indignes, de vivre en échange de ployer le genou ? Oh non, pas vivre… survivre, plutôt. Parce que persistait quelque part l’espoir de se soustraire un jour ou l’autre à ce chemin de croix. D’un geste brusque, en prenant un troisième débris, la main d’Estienne envoya rageusement vers Hyriel un peu de poussière de craie.

NON, PAS QUE CE MOT. ÉGOÏSTE AUSSY !
TU VEUX IUSTE FAYR LE PLUS DE
TOHU BOHU POSSIBLE POUR TON PLAISIR ?

Le goût du défendu. Le plaisir du Diviseur. Après tout, n’avait-il pas entendu plusieurs fois Hyriel affirmer qu’il tenait à s’amuser ? Et si… eux deux… C’était défendu, ça aussi. Estienne frémit à l’idée que ce serpent n’appréciât en lui que la saveur de l’interdit. Rien d’autre. Sûr, il ne restait que cette explication, pour baiser un grogneur, un chien, une tronche de mur fissuré. Dehors, Monsieur aimait jadis une merveilleuse dame et un joli gitan. Comment Estienne avait-il pu s’imaginer faire le poids à côté… Ce diable était venu pour son malheur. Oui, c’était un sorcier !

— Vraiment ? C’est comme ça que tu me vois ? éructait Hyriel. O pel dimoni ! Ha, sans rire ! Comme si ça me plaisait d’être là et de chercher le danger pour… rha !

Incapable d’achever, il secoua la tête avant de s’appuyer au mur pour fermer les yeux. Et respirer, fort. Estienne fut statufié par la porte close de ces paupières. Le message ne saurait être plus clair : ces yeux clos équivalaient à un « va donc au Diable, je ne veux plus te lire ». Pratique, que d’avoir en un battement de cils un tel pouvoir sur sa non-parole ! C’était se retrouver fondu dans une de ces parois. Estienne retint un râle – il ne lui donnerait pas cela. Il serra les poings.

Hyriel entendit la ferme cadence de sa démarche soldatesque qui s’éloignaient. Pour ne plus revenir. Un souffle lui échappa. Bon débarras. Il se passa un moment avant que sa respiration ne retrouvât un rythme convenable. Hyriel se laissa glisser au sol telle une loque, le visage fendu d’une grimace générée par la douleur sous ses bandages – douleur qu’il avait cherchée, bien sûr !

Les sabots d’Estienne avaient cessé de résonner entre les couloirs : il s’était trouvé un coin où se terrer, loin d’Hyriel, loin de tous. Dormir. Il aurait vendu son reste d’âme pour ensevelir ses peines dans un trou noir. Son souffle s’encombra de sel et de cailloux tranchants. Ses mains étaient broyées d’avoir dû composer ses lettres avec des débris. Il n’avait plus de craie. Il n’eut même pas envie d’aller en réclamer de nouvelles auprès d’un administrateur. Écrire pour qui ? Quand ses yeux fatigués n’eurent plus rien à verser, quand sa chienne de gorge fut un puits à sec, il tomba en un demi-sommeil lourd de sueur.

Il fallut que Maurice le trouvât là, échoué, pour lui dire que s’il ne se remuait pas il allait manquer la pitance du soir. Estienne se tenait en boule aux flancs de la paroi. Son courroux tonnait encore entre ses côtes. Son cœur tapait contre sa peau. Il mobilisa tous ses efforts pour ne point trop montrer combien ce déchirement d’avec Hyriel l’affectait. Une chance que le cruel défaut de lumière cachât son expression à Maurice, le temps de se lever, de se composer un sourire des yeux et des pommettes capable de donner le change, de le suivre enfin.

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Aramis
Posté le 30/10/2023
Ouiiiiiii je suis à jour, enfin, qui l'eut cru !!!
J'ai beaucoup aimé le chapitre (je suis désolée de dire ça pour hyriel) sur la punition et l'enfermement, particulièrement la punition (olala comment ça sonne :') )
Also, cette scène "finale" de conflit est du pain béni, je l'attendais grandement (je suis si désolée d'écrire ça je vous jure hahaha je suis une terrible personne) mais voir une opposition, de la tension, entre les personnages, comme vous savez j'en manquais ! Du coup j'en viens à mes propositions :

- je trouve qu'estienne manque un peu de retrait, de la même manière que j'avais soulevé que, pour moi, sa réticence à leur histoire était trop vite balayée, je crois que j'aurais aimé le sentir moins investi dans les trucages d'hyriel (ici je parle particulièrement du coup des caisses...) à mon goût, vous pourriez gagner à faire transparaître par petites touches leurs oppositions, grandissantes jusqu'à cet éclat de fin de chapitre XV, dans leurs interactions préalables (certes on sait qu'estienne a un caractère plus prudent mais il ne se heurte pas vraiment directement à Hyriel précédemment)

- aussi je ne sais pas si j'ai tout a fais réussis à sentir cette résistance d'hyriel qui se brise peu à peu, je ne sais pas si quelque chose vous a été transmis en BL, mais j'ai plutôt eu l'impression qu'il lutte dans un rapport constant du début au fouet pour être brutalement brisé. Je me demande si cette volonté qu'il a ne pourrait pas gagner en grandeur et en tragique alors qu'il s'efforce d'être de plus en plus dans l'opposition, un peu à la manière de McMurphy dans vol au dessus d'un nid de coucou (si vous avez la référence mais j'imagine que oui hehe)

- j'aime beaucoup le petit retournement d'Estienne qui interprète les actes d'hyriel comme plus généralement orientés aussi dans leur relation, et qu'il se mette à douter des raisons de leur rapprochement ! Je ne m'y attendais pas forcément et ça annonce encore plus de drame donc c'est très triste bien sûr
Mais aussi ça annonce des développements intéressants 👀

Voilaaaa j'ai bien hâte de voir la suite arriver, en tout cas bravo pour votre travail sur ce texte de manière générale !!
JeannieC.
Posté le 05/11/2023
Hellow Aramis ! =D
Awwwww c'est trop chouette - merci infiniment pour ta lecture fidèle, merci d'avoir lu tout ça avec un tel allant <3

Tes deux conseils vont tout à fait dans le sens de ce que nous ont dit des BL et que nous avons déjà commencé à retravailler :
- rendre bien plus saillants les troubles d'Estienne, qu'il n'accepte clairement pas aussi facilement son attirance pour Hyriel. La scène des caisses, oui, on va la reprendre, et nous allons réécrire aussi la précédente pour montrer qu'Estienne n'est pas du tout d'accord avec la nouvelle dinguerie d'Hyriel... mais qu'il cède par peur de le perdre, peur de retourner à la solitude et au silence u_u
- Et Hyriel, oui, on va donner une meilleure gradation à son péage de plomb, qu'on commence à sentir qu'il a les nerfs dès le chapitre 9 et que ça ne fasse qu'aller s'empirant depuis.

Tu as TOUT A FAIT raison de mentionner Mc Murphy et "Vol au dessus d'un nid de coucou" <3 Comme je le disais l'autre jour sur Instagram, ce film est carrément une de mes inspirations pour ce roman ! Helasabeth ne l'a pas vu, mais moi c'est un de mes films préférés et oui, je voulais rendre dans ce texte le décalage entre l'environnement carcéral et la résistance des protagonistes. Hyriel a tout a fait un tempérament à la Mc Murphy, c'est très juste : pour ne pas dépérir, enquiquiner les figures d'autorité tant qu'il en a la possibilité. On va travailler à ce que son usure - et donc sa plongée dans les bêtises - soit plus progressive.

On est ravies que tu aies apprécié ces derniers chapitres - ABSOLUMENT HORRIBLES ahah ! Voui, la dispute d'Hyriel et Estienne couvait depuis un petit moment... ils s'aiment, mais n'ont clairement pas les mêmes façons de réagir dans l'adversité. L'un est colérique et malicieux, l'autre flegmatique et réfugié dans son imaginaire x)

Merci encore pour tes encouragements et tout ton entrain pour ce roman <3
Aramis
Posté le 06/11/2023
Trop biiiien, heureuse de voir que vous avez des retours cohérents les uns avec les autres (rien de pire que d'avoir des avis qui se contredisent hahahaha) et que ça aille dans un sens qui vous intéresse ! J'ai bien hâte de voir ce que donnera la version finale de ce projet, et de lire la suite en attendant hihihi !

ET JE SUIS RAVIE DE VOIR QU'HYRIEL EST LE COUSIN DE MCMURPHY car, quel homme. J'avoue tout, je n'ai pas encore eu l'occasion de voir le film (c'est un projet cependant) mais le livre fait parti de mes must have, je ne sais pas si vous l'avez lu, ça peut être intéressant pour vous aussi, peut-être de voir comment le personnage est construit à l'écrit (même si, des passages que j'en ai vu, j'ai l'impression que le film est très fidèle !)

Courage pour les corrections en tout cas ! Je reste dans les parages pour la suite, et si jamais vous avez besoins de moi pour quoi que ce soit on ne sait jamais !
Hortense
Posté le 22/09/2023
Un chapitre bouleversant tant l'émotion y est palpable. Sous les récriminations, la rancœur, point le désespoir et la peur. Peur de perdre l'être aimé, peur de perdre tout espoir, peur de se perdre soi-même. Cet affrontement était probablement inévitable, tant Hyriel semble mettre de détermination à s'attirer les ennuis. Est-ce du courage, un désir inconscient suicidaire comme le soupçonne Estienne ? Probablement un peu de tout. L'horizon bouché ne lui donne cependant pas tort car quel espoir conserver entre ces murs si ce n'est celui de demeurer debout face à l'adversité, et peut-être de mourir en homme et non en animal.

Quelques suggestions :

- qu’au prix de toute son attention dévolue : l'attention ?
- Rien ne fut pour s’arranger : rien ne s'arrangea ?
- gratter le gel aux grilles : des grilles ?
- demeuraient dans sa cécité les seuls responsables : leur cécité
- qui allait alléger un tant fût peu son humeur : soit peu, le « fût » sonne bizarre à mes oreilles.
Au plaisir !
JeannieC.
Posté le 22/09/2023
Re !
Tu mets des mots justes et émouvants sur ce qui se passe entre Hyriel et Estienne, vraiment merci pour cette sensibilité <3 Il y a un peu de tout ça en effet... peur de perdre son amour pour Estienne, peur de la folie, de la solitude, souhait d'Hyriel de rester un homme coûte que coûte - d'où entre autres son rapport assez pathologique à l'adversité.
Et les voilà dans l'incommunication, et à devoir penser autrement désormais leurs manigances et désirs d'évasion.

On prend bonne note, comme toujours, de tes remarques sur les quelques imprécisions.
Merci encore ! =)
À bientôt
ZeGoldKat
Posté le 20/09/2023
Salut,

Je suis toujours aussi content de trouver un peu de temps pour cette lecture. Comme pour changer, l'écriture est toujours incroyable ! C'est prenant, c'est sensible, avec plein d'images fortes qui m'ont fait saisir cet épuisement qui rend fous nos deux protagonistes...
On est en plein dans ce genre de fatigue qui te fait tout voir en mode agressif, dire les choses beaucoup plus violemment que comment tu les penses (même si pour le coup y a du vrai et des mises au point qui devaient quand même finir par arriver).
Le parallèle avec les stations du chemin de croix ça donne le ton ! On enchaîne sur les taillades de la peau et des muscles à la corvée, awwww ça fait frissonner, on les ressent. Mais j'ai surtout été saisi par la douleur d'Estienne quand, déjà à bout de nerfs, il ne peut même plus écrire. Comment l'ampleur de son handicap ressort dans ce moment ! Avec ses contraintes matérielles et sa grosse dose d'humiliation. La claque, niveau expression de l’épuisement lié à un handicap.

Vous m'avez appris un mot ahah (venette, c'est joli en plus !) ^^ J'ai souri aussi (mais un sourire amer, vu les vacheries qu'Hyriel et Estienne s'échangent...) aux chashs au fil de la scène. "Joue pas au plus couillon avec moi t'as pas le niveau" ahah, "ce mot à la bouche" PTN mais ce KO...

Sur le fond, je ne suis pas surpris : cette dispute couvait depuis un moment. Je la redoutais et l'attendais à la fois. C'est hyper triste. Parce qu'ils s'aiment, c'est sûr, mais qu'il y a cette question entre eux et qu'ils vont devoir résoudre.
La posture de regrets et les reproches d'Estienne se comprennent. Si Hyriel change pas, il ne va pas tenir longtemps et au delà de sa propre personne, ce serait abandonner l'homme qu'il aime. Pourtant de l'autre côté, j'ai toujours autant d'amitié pour Hyriel. Vu tout ce qu'il y a comme souffrance, derrière cette violence. Niveau cheminement du héros, il est à un tournant. C'est vachement bien, c'est humain, émouvant, ce héros pas lisse du tout qui sort de ses gonds et a une colère sur laquelle il doit travailler. Je ne sais pas commet je serais à leur place à tous les deux, alors on leur pardonne fort ce moment agressif <3
Quand même, trop triste. Il me tarde de savoir comment l'un et l'autre vont évoluer maintenant. S'ils vont se remettre ensemble (j'espèèèère) et comment ils vont pouvoir continuer de préparer une évasion dans ces conditions.

Bravo encore !
A tantôt
JeannieC.
Posté le 22/09/2023
Salut ! =)
Merci beaucoup pour tes impressions. <3 Tu poses à chaque fois des mots justes sur notre texte et ce que traversent nos deux loulous.
Nous sommes touchées par la manière dont ce clash semble t'avoir embarqué, mais aussi le rendu de l'extrême fatigue nerveuse d'Hyriel comme d'Estienne. C'est très juste ce que tu dis : ce genre de disputes où l'épuisement y est pour beaucoup et où les paroles sont bien au-delà de ce qui nous anime...
L'un sans l'autre désormais, leurs plans vont en effet devoir être révisés x)
Merci encore pour ton passage et à bientôt !
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