Bien que la lettre soit partie, Zhen YuJin ne se sentait pas rassuré pour autant. À cet instant, il savait seulement que son bien-aimé était en vie, mais de là à savoir s’il allait réellement recevoir une réponse… Il se tourna à nouveau vers Chan YinMai, toujours assis sur le sol, les sourcils froncés par la concentration. Jian Lin et HengXing ShanYao partageaient nettement la même inquiétude que lui, eux aussi avaient le regard fixé sur le Médium. Ce dernier tâchait de rester aussi serein que possible et de ne pas se laisser influencer par leurs ondes d’angoisses. Dans la mesure où ses capacités se manifestaient à lui régulièrement, l’idée d’essayer de les utiliser sur commande ne lui était pas spécialement déjà venu à l’esprit. Une partie de lui se sentait tout aussi effrayé à l’idée qu’ils arrivent trop tard, néanmoins il essaya de repousser cette crainte dans un coin de son esprit pour se focaliser sur ce qu’il savait du Cultivateur. Il visualisa son visage, mais ses traits s’effacèrent rapidement pour devenir ceux de Ping Yu. Le Musivateur s’accroupit devant Chan YinMai, le visage grave. Il tendit le doigt en direction de la sortie du tunnel :
— Il est ici, dans l’un des couloirs, mais mal en point.
De surprise, Chan YinMai rouvrit les paupières. Les trois autres hommes l’entouraient. Il resta focalisé sur Ping Yu dont la silhouette éthérée vacillait, beaucoup moins nette que lorsqu’il gardait les yeux clos.
— Zhang JingXi est dans le secteur, reprit le Médium en se relevant lentement. Dans les tunnels et blessé.
À l’instant où il prononça ces paroles, il vit nettement le Cultivateur étendu sur le sol, dans un couloir sombre et porta machinalement une main à son épaule qui lui paraissait soudain très engourdie. L’image de Ping Yu disparu, sans qu’il n’arrive à savoir s’il venait de voir à nouveau son esprit ou s’il s’agissait d’une projection de son imagination.
Zhen YuJin pivota aussitôt vers la sortie, le teint très pâle :
— Il faut que je le trouve !
Le Chef de Clan et le Capitaine échangèrent un regard, avant que Jian Lin ne tende la main pour le retenir :
— Attendez ! Vous ne pouvez pas vous engager ainsi dans ce dédale. Il y a des centaines de couloirs, certains sont devenus dangereux avec les années, le chercher sans aucune indication revient à vous mettre vous-même en danger.
Avec humeur, le Musivateur balaya la remarque de Jian Lin et sa main dans la foulée :
— Et que voulez-vous que je fasse d’autre ?! Je ne vais pas l’abandonner dans cet état !
— Il n’est aucunement question de le laisser tomber, intervint HengXing ShanYao en essayant de l’apaiser. Mais si nous devons chercher dans tout le réseau, il va falloir que nous fassions attention.
Le Maître du Feu faillit leur rétorquer sèchement qu’il n’en avait strictement rien à foutre de leurs conseils, qu’il voulait juste partir dès à présent pour chercher Zhang JingXi. Il se retint de justesse, conscient que sa peur de le perdre prenait le pas sur la rationalité. Il s’efforça de garder la tête froide. Néanmoins, il serrait ses mains si fort l’une contre l’autre que ses ongles s’enfonçaient dans sa chair. Chan YinMai se rapprocha de lui, tout en s’adressant aux autres :
— Peut-être pourrions-nous faire deux équipes de deux ? Capitaine, vous connaissez les dédales, vous pouvez certainement vous repérer plus facilement et vous faire accompagner du Chef de Clan HengXing. De mon côté, je suppose que je peux essayer d’aider Zhen YuJin, peut-être que j’arriverais à percevoir certaines choses…
Jian Lin prit quelques secondes à considérer la proposition, avant de hocher la tête. Sans dire un mot supplémentaire, il invita les trois autres à le suivre et rebroussa chemin d’un pas hâtif.
Le cœur battant d’anxiété, Zhen YuJin le talonna, tout en priant intérieurement pour retrouver Zhang JingXi à temps. Il ne leur fallu quelques instants avant de déboucher sur la deuxième salle et il entendit quelques exclamations de surprise de la part des gardes. En les voyant arriver, l’un d’eux s’exclama :
— Capitaine ! Attention, il y a ce truc qui fonce sur vous !
Instinctivement, Jian Lin eut un mouvement de recul et le Musivateur vit nettement un sillon enflammé foncer droit sur eux. Ou plus exactement droit sur lui. En découvrant le dragon qui pila net devant son visage, il comprit aussitôt et leva les deux mains en coupe comme pour le soutenir.
— C’est A-Xi ! s’écria-t-il.
— … Quoi ?
Éberlué, le Capitaine regarda l’animal dont les flammes perdaient parfois en vigueur, puis vit Chan YinMai approuver aussitôt et expliquer rapidement :
— Il a fait le même dragon, en dix fois plus grand, il y a deux soirs.
Inquiet en voyant les flammèches faiblir, Zhen YuJin observa la petite création entre ses doigts et lui insuffla instinctivement une partie de son propre Qi pour l’aider à tenir, tout en murmurant :
— Conduis-nous à lui.
Aussitôt, le dragon s’échappa de ses mains et commença à se mouvoir devant eux pour leur servir de guide, le Musivateur se mit à courir pour le suivre. Chan YinMai s’empressa de lui emboiter le pas, imité par HengXing ShanYao et Jian Lin, tous deux ayant renoncé à poser des questions sur ce qu’il se passait actuellement.
Ils traversèrent la salle sous le regard étonné des personnes en train de s’occuper des dépouilles encore présentes dans les lieux, puis s’engagèrent dans un couloir qu’ils n’avaient pas exploré la veille.
Tout en courant, Zhen YuJin avait fait apparaitre un tigre de feu pour mieux éclairer leur parcours. Après avoir tourné dans un angle, il sentit son cœur rater quelques battements et se glacer en devinant une silhouette étendue sur le sol, quelques mètres plus loin. Il accéléra si brusquement que ses pieds semblèrent ne toucher qu’à peine le sol. Il se précipita jusqu’à son partenaire et se laissa ensuite tomber brutalement à genoux à ses côtés :
— A-Xi !
Le Cultivateur, gisant à plat ventre, n’avait pas bougé en les entendant arriver. Le Maître du Feu fit apparaitre une dizaine d’oiseaux enflammés pour mieux éclairer les lieux et le redressa avec précaution en le maintenant contre lui. Ses vêtements étaient tachés d’un sang noircit, son teint extrêmement pâle n’augurait rien de bon. Il irradiait de fièvre. Avec précaution, le Musivateur lui effleura le visage et le trouva brûlant, moite de sueur. À nouveau, il appela à mi-voix cette fois :
— A-Xi…
Zhang JingXi battit des paupières avec difficulté. Sa respiration irrégulière s’échappait de ses lèvres entrouvertes et il ouvrit tant bien que mal les yeux. L’ombre d’un sourire se dessina lorsqu’il reconnut son amant et son corps se fit plus lourd alors qu’il s’affaissait davantage dans son étreinte :
— Tu m’as trouvé… souffla-t-il avec difficulté.
Zhen YuJin hocha la tête, essayant de ne pas montrer sa panique face à son état et parvint à répondre d’une voix rassurante :
— Accroche-toi, on va te sortir de là.
Tout en prononçant ces mots, il releva la tête vers les autres. Le Capitaine s’était tourné vers HengXing ShanYao pendant ce bref échange pour lui transmettre des instructions et le Chef de Clan venait de détaler dans les couloirs.
Durant ces quelques secondes où le Musivateur les regardait, la tête de Zhang JingXi tomba sur son épaule tandis que ses paupières se refermaient.
Le dragon de feu s’éteignit.
Zhen YuJin serra plus fort son bien-aimé contre lui, se focalisant sur le son de sa respiration. Tant qu’il l’entendait, il y avait l’espoir de le sauver.
Jian Lin pivota ensuite vers le Musivateur :
— Venez, nous devons le ramener chez lui pour pouvoir le soigner en toute sécurité. HengXing XiaoHong va pouvoir s’en occuper.
Le Maître du Feu passa aussitôt son bras sous les jambes de son amant et se remit debout en le soulevant. Le Capitaine entama aussitôt un demi-tour rapide et il le suivit. Pour se rassurer, il tourna machinalement les yeux vers Chan YinMai qui avançait à côté de lui, espérant que ce dernier allait lui adresser un signe de tête lui signifiant que tout allait bien, qu’ils allaient réussir à le maintenir en vie. Mais son meilleur ami regardait droit devant lui, le visage tout aussi soucieux. En silence, Zhen YuJin baissa les yeux vers son homme, priant tous les Dieux qu’il connaissait. Il savait déjà qu’il tenait énormément à Zhang JingXi, qu’il ne voulait pas s’éloigner de lui. À cet instant, devant son état indiquant que sa vie ne tenait qu’à un fil, il se sentait démuni et terrifié. Et il ne savait pas du tout ce qu’il ferait si son cher et tendre venait à mourir dans les prochaines minutes. Le Maître du Feu se mordit violemment la lèvre inférieure, cherchant à garder un minimum de sang-froid et à retrouver son attitude familière où il évitait de trop montrer aux autres ce qu’il ressentait.
Ses yeux se posèrent sur l’ourlet de la robe déchirée de son amant ; il s’était improvisé un bandage à l’épaule dont le tissu était à présent entièrement imbibé par ce sang noircit. Il se demanda pourquoi il était sorti sans les prévenir et depuis combien de temps il attendait, affaibli, dans son tunnel à l’écart de leur zone d’intervention.
— A-Jin… l’appela Chan YinMai à mi-voix.
Le ton du Médium interpella aussitôt Zhen YuJin qui releva machinalement la tête. Son meilleur ami tourna brièvement son visage vers le sien, avant de désigner quelque chose d’un discret signe de tête.
Accaparé par ses pensées, le Musivateur avait suivi le mouvement du Capitaine Jian Lin sans faire attention et il comprit aussitôt pourquoi les yeux de Chan YinMai étaient à présent alertes. Ils se trouvaient dans l’allée devant le pavillon de l’ancien Intendant, mais au lieu de continuer à la descendre en direction de la ville, ce qui serait le chemin le plus logique pour ramener Zhang JingXi chez lui, le Capitaine des Gardes s’était engagé directement sur la montée, en direction de la porte du genévrier. Donc en direction du Palais Impérial.
Instinctivement, le Maître du Feu resserra son étreinte autour du blessé, avant de scruter le visage du Médium qui semblait chercher à savoir s’ils fonçaient droit dans des ennuis ou non. En attendant, Zhen YuJin estima ne pas avoir le luxe du choix, même si la situation l’intriguait. Son amour avait besoin de soins urgents et il ignorait où il vivait, peut-être était-ce plus court de passer par le Domaine Impérial… ?
Ils avançaient si vite qu’à peine avait-il eu le temps de formuler ses pensées que Jian Lin leur faisait franchir la porte dans le mur. Ils dépassèrent le grand arbre, sauf qu’au lieu de se diriger vers la sortie, ils continuèrent à courir à travers les cours et jardins. Plus ils avançaient, plus le Musivateur sentait son cœur tambouriner, de plus en plus fort, dans sa poitrine. L’homme à la tête de leur groupe les entrainaient dans des endroits de plus en plus privés, jusqu’à des espaces verts et fleuris que Zhen YuJin aurait reconnu entre mille. Ils venaient d’arriver dans la partie la plus tranquille du domaine, là où se trouvaient à ses yeux les plus beaux jardins au milieu desquels se dressait le pavillon contenant les quartiers privés de l’Empereur en personne. Le bâtiment avait bien sûr été intégralement reconstruit depuis son enfance, mais il sentit son pas se ralentir et cru que son cœur allait s’échapper de son corps tant il battait follement.
Que faisaient-ils là ?
Il fallait sauver Zhang JingXi et non réclamer une audience à sa Majesté !
Alors qu’il ouvrait la bouche pour réclamer des explications à Jian Lin, HengXing ShanYao jaillit par la porte grande ouverte du pavillon :
— Ah vous voilà ! Ma sœur vous attend !
Renonçant à comprendre quoi que ce soit, l’ancien Prince Héritier pénétra dans la maison qui se dressait à la place de son ancienne demeure, talonnant toujours Jian Lin. Sans hésiter, ce dernier les conduisit dans un couloir, jusqu’à une pièce tout au fond : une chambre.
Des couvertures et des linges avaient été jetés sur le lit pour le protéger et la Demoiselle du Clan HengXing avait étalé le contenu de sa sacoche sur le sol, la table de chevet et le bureau. Les voyant surgir dans la pièce, elle fit aussitôt signe à Zhen YuJin :
— Posez-le sur le lit.
Il obéit, les mains tremblantes et sentit Chan YinMai lui prendre le bras et le faire reculer pour laisser à la jeune femme l’espace libre pour agir. Hébété, le Musivateur ne savait plus ce qu’il devait regarder. Son attention se focalisa un instant sur HengXing XiaoHong qui défit sans attendre le pansement de fortune, avant de déchirer le vêtement souillé pour avoir un meilleur accès à la plaie. Il tourna ensuite les yeux vers le bureau ; à côté de la sacoche de médecienne, il y avait un fourreau vide assortit à la poignée de MengYou, ainsi qu’un encensoir et une réserve d’encens au camphre, cette même odeur qu’il avait déjà senti plusieurs fois sur son amant. La jeune femme épongeait le sang avec de l’eau et des linges, Zhang JingXi était toujours inconscient sur le lit. Des peintures décoraient les murs, des paysages principalement, mais le Musivateur fut certain de reconnaître le style de dessin de son amoureux.
Des pas précipités se firent entendre et l’Intendant YiShi Shen se précipita dans la chambre, suivi par le Chef de Clan qui venait vraisemblablement de le mettre au courant. Le vieil homme tourna immédiatement la tête vers le blessé et perdit toutes couleurs, avant de se passer une main nerveuse dans les cheveux en se lamentant :
— Ah, quel malheur ! Je savais qu’un jour il finirait par avoir des ennuis à s’amuser à courir partout sans escorte !
Il pivota soudain vers le Musivateur :
— Que s’est-il passé ?! HengXing ShanYao m’affirme que vous l’avez tous trouvé à moitié mort dans les souterrains ! Il m’a pourtant laissé un mot pour m’informer qu’il partait vous rejoindre ! Alors comment se fait-il… ?!
Le visage de Zhen YuJin se décomposa alors qu’il reculait comme s’il venait de recevoir un coup de poing dans l’estomac :
— Me rejoindre, moi ?
Chan YinMai lui tenait toujours le bras et fronça les sourcils :
— Seigneur YiShi, nous ne l’avons pas revu depuis hier soir. Depuis qu’il est parti avec le Capitaine Jian.
Celui-ci, jusqu’alors silencieux, hocha la tête :
— Je l’ai ramené ici, en effet.
Ici.
Le Maître du Feu déglutit difficilement en constatant que plus personne ne semblait jouer la moindre comédie. Son ancien mentor couvait le blessé avec un regard semblable à celui d’un père qui s’inquiéterait pour son enfant. Son attitude n’avait rien à voir avec la veille où il avait semblé ne pas connaître Zhang JingXi.
— A-Xi…
Il se tut un instant, ne sachant plus comment il devait nommer son bien-aimé et se passa une main sur le visage, en reprenant d’une voix légèrement tremblante :
— Il m’a écrit, hier soir, pour me confirmer qu’il venait de rentrer chez lui et me disait que nous nous retrouverions aujourd’hui, devant l’ancienne demeure de ZiaHo ZhiXiang. Je n’ai pas eu de ses nouvelles depuis, je m’attendais à le voir ce matin, comme prévu…
Le Chef de Clan approuva aussitôt ses paroles, imité par le Capitaine :
— C’est tout à fait vrai, Seigneur YiShi. Zhen YuJin s’inquiétait d’ailleurs de ne pas le voir, comme nous autre. Personne ne savait qu’il était ressorti.
Le Maître du Feu regarda un peu plus franchement son ancien Précepteur :
— Vous dîtes qu’il est ressorti pour aller me voir ?
Le vieil homme hocha aussitôt la tête en désignant le bureau :
— Oui. J’ai trouvé une note, ce matin, où il me disait de ne pas m’inquiéter de son absence parce qu’il partait vous rejoindre pour vous parler. Je le pensais en sécurité avec vous, jusqu’à ce que le Chef de Clan HengXing vienne me prévenir que vous veniez de le trouver…
Zhen YuJin sentit le sol tanguer dangereusement sous ses pieds et sentit la poigne de Chan YinMai se serrer plus fort autour de son bras comme pour essayer de le stabiliser. Il eut le réflexe de s’adosser contre le mur.
C’est ma faute… Il est ressorti en pleine nuit pour venir me voir… Il est dans cet état à cause de moi.
— Il a certainement fait une mauvaise rencontre en chemin, estima Jian Lin. Étant donné le couloir où nous l’avons trouvé, je suis quasiment certain qu’il venait du passage qu’il a créé, il y a douze ans, lorsqu’il a aidé les prisonniers à s’échapper. Mais pourquoi a-t-il eu cette soudaine lubie de vouloir ressortir pour vous parler ?
La dernière question s’adressait au Maître du Feu qui lui retourna un regard vide, n’ayant pas lui-même la réponse à cette interrogation. Du moins jusqu’à ce qu’il croise ensuite les yeux de l’Intendant. Il tressaillit et dégagea doucement son bras de l’étreinte de son meilleur ami, avant de se décoller du mur.
— Maître YiShi… Il voulait me dire la vérité… Il voulait me dire qu’il était Ming XiWang… ?
L’ancien Précepteur se passa une main sur la nuque et soupira :
— Je n’en ai pas la conviction absolue, mais c’est fort probable. À son retour, hier soir, nous avons longuement parlé de vous et je lui ai vivement conseillé de vous avouer son secret. Cependant, je ne m’attendais pas à ce qu’il prenne ce risque inconsidéré de ressortir, je pensais qu’il attendrait au moins ce matin…
D’un geste las, il désigna l’homme étendu sur le lit et souffla :
— Je suis sincèrement navré que vous ayez découvert toute la vérité dans ces circonstances.
Zhen YuJin observa à nouveau le Cultivateur sans connaissance. Le frère et la sœur HengXing l’avaient déshabillé jusqu’à la taille, tous deux s’affairaient à nettoyer la blessure à l’épaule et à surveiller sa fièvre. La jeune femme avait appliqué quelques gouttes d’une préparation sur la plaie, puis avait réussi à faire couler un autre remède entre ses lèvres, mais une vive contrariété marquait son visage. Le torse de Sa Majesté se soulevait toujours au rythme d’une respiration bien trop rapide et sa fièvre ne voulait pas s’atténuer. Pire, du sang se mit à couler du nez de Ming XiWang.
Alarmée, la jeune femme porta aussitôt un linge près de ses narines :
— Ça ne va pas du tout ! Toutes mes préparations n’ont pas du tout l’effet escompté, le poison qui circule dans ses veines ne veut pas s’en aller, c’est tout juste si j’arrive à ralentir sa progression !
Réfléchissant à toute vitesse, elle fit signe à Jian Lin de s’approcher :
— Transmets lui du Qi, pour essayer de le soutenir.
Aussitôt, le Capitaine s’agenouilla au chevet de Zhang JingXi et prit son poignet entre ses doigts, avant de commencer à lui transférer son Énergie Spirituelle. La jeune femme observa les autres, toute aussi effrayée qu’eux à l’idée que leur Empereur et ami ne décède dans les prochaines minutes. Elle observa un bref instant le Maître du Feu, puis l’invita d’un geste à venir de l’autre côté du blessé :
— Faites pareil avec son autre bras, je veux toutes les chances de notre côté.
Sans réfléchir, prêt à briser son propre Noyau d’Or s’il le fallait pour sauver son amour, Zhen YuJin bondit de l’autre côté du lit et imita Jian Lin. Fou d’inquiétude, il dévisagea son amant dont le visage était bien plus blanc que lorsqu’il l’avait sorti des souterrains. La Jeune Maîtresse HengXing pivota vers son frère :
— Rien de ce que j’ai ici ne fonctionne. Je t’en conjure, fonce jusqu’à l’herboriste en centre-ville, prends tout ce que tu trouves qui pourra servir ! Et n’y va pas tout seul !
Le Chef de Clan acquiesça, tout en regrettant d’avoir demandé à Hei TaiYang de rester auprès des corps pour continuer à répertorier ce qu’il pouvait. S’il voulait être escorté, il allait devoir faire un détour et perdre de précieuses minutes. Au même instant, Chan YinMai s’avança :
— Je me charge de l’accompagner.
Le Médium ne savait pas lui-même pourquoi il venait de faire cette proposition. Celle-ci fut aussitôt acceptée et le Capitaine enchaîna :
— Passez par la porte du genévrier et prenez l’allée, pour être discrets. Vous avez l’autorisation de voler dans tout le domaine.
Sur ces mots, il lança un talisman taillé dans la pierre à HengXing ShanYao qui l’attrapa agilement au vol. Ce dernier adressa ensuite un bref regard au Médium qui hocha la tête et tous deux se ruèrent hors de la chambre.
Zhen YuJin les entendit s’éloigner à toutes jambes. Son index, son majeur et son pouce tenaient le poignet de Zhang JingXi, il avait conscience que chaque seconde qui s’écoulait était précieuse.
— Comment se fait-il que tes contrepoisons habituels ne fonctionnent pas ? s’enquit Jian Lin d’une voix blanche.
— Je n’en ai pas la moindre idée… avoua la jeune femme d’une voix désespérée.
Zhen YuJin sentit son cœur chuter comme une pierre dans sa cage thoracique. Il se jura de transférer tout son Qi, aussi longtemps qu’il le faudrait, tout en ayant conscience que si le poison ne voulait pas s’en aller, sa propre Énergie Spirituelle ne suffirait pas à maintenir l’Empereur en vie. HengXing XiaoHong avait demandé son soutien et celui du Capitaine faute de ne pas avoir d’autres solutions efficaces sous le coude pour le moment. En intervenant tous les deux, ils venaient apporter un certain soutien au Qi de Zhang JingXi et permettait à ce dernier de moins s’épuiser dans sa lutte pour rester en vie. Mais ils ne faisaient que ralentir la progression, ils ne l’arrêtaient pas.
Il approcha sa main libre pour la poser contre la joue de son amour et, malgré son inconscience, Ming XiWang tourna légèrement la tête dans sa direction, permettant ainsi au Maître du Feu de voir que son nez n’était pas le seul à saigner. Un filet rouge commençait à sortir du coin de ses lèvres.
… Ils ne vont jamais réussir à revenir à temps de chez l’herboriste, réalisa-t-il avec effroi.
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Une illustration associée à ce chapitre est disponible sur mon Instagram, elle a été réalisée par Druide Lunaire : https://www.instagram.com/p/C6idx3htA6K/